Cet article se propose de donner un aperçu général de la présidence du Conseil: son origine, son évolution, étroitement liée aux développements intervenus dans l'histoire des Communautés, les éléments qui déterminent son efficacité et les perspectives d'avenir en vue notamment de la prochaine réforme des traités. La présidence espagnole, qui couvre la période de juillet à décembre {1}995, sert d'illustration dans ce cadre.
Introduction (origine et évolution)
Bien que d'origine fortuite, la présidence s'est affirmée au fil du temps dans la pratique. Ses bases juridiques provenaient initialement de quelques articles du Traité CEE (articles 146 et {1}43) et, ensuite, du Traité de fusion (art. 2 et 7).1 Les dispositions les plus importantes se trouvent aujourd'hui dans le Traité CE (art. 146 et 147) et dans le Traité sur l'Union européenne (art. N), auxquels il faut ajouter les dispositions contenues dans le Règlement intérieur du Conseil.2
Le but de cet article n'est pas d'examiner de façon exhaustive les dispositions à caractère juridique sur la présidence; c'est pourquoi, seules les plus pertinentes seront signalées. Ainsi, l'article 146 du Traité CE constitue la base juridique fondamentale; il établit le concept de la présidence et en fixe la durée et l'ordre de rotation. Il faut savoir que l'ordre établi dans le Traité CE, d'après l'accord passé au Conseil européen les {1}0 et 11 décembre 1993, peut être modifié par les Etats membres agissant à l'unanimité; les Etats membres ont aussi la possibilité d'échanger la période de leur présidence respective.3
Notons que la présidence du Conseil est un phénomène propre à l'intégration européenne, sans aucune analogie avec la présidence des organisations internationales.4
En ce qui concerne le système de rotation, il est intéressant de remarquer l'établissement d'un système égalitaire entre les Etats membres, égalité qui est à la base du fonctionnement des organisations internationales et que l'Union applique seulement à ce niveau; cela est sans aucun doute dû à des raisons historiques et à la volonté d'éviter d'utiliser la présidence pour le seul bénéfice national.5
L'article 147 du Traité CE contient des dispositions sur l'initiative de la convocation du Conseil et l'art. N (Traité sur l'UE) accorde au Président du Conseil la compétence de convoquer la réunion d'une Conférence intergouvernementale (CIG) tendant à la révision des traités sur lesquels est fondée l'Union.
Le Traité de Maastricht contient de nouveaux articles concernant la présidence, qui lui confèrent un rôle prédominant dans le cadre de la Politique étrangère et de sécurité commune6 et de la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.7.
La présidence n'est pas une institution, mais une fonction qui s'est développée dans le temps. A la dimension technique originelle de la présidence des Communautés, s'est ajoutée une dimension politique qui a finalement pris le dessus.8
Le rôle de la présidence n'a cessé d'évoluer, mais se pouvoirs n'ont pas été institutionnalisés. Pour cette raison, d'aucuns affirment que la présidence est une responsabilité sans pouvoir.9
L'équilibre institutionnel initial a été remplacé par de nouveaux processus décisionnels qui ont modifié les rapports entre les institutions, en particulier entre le Conseil et la Commission. D'après certains auteurs, l'attitude de relative passivité de la Commission a provoqué un vide dans la vie communautaire, vide qui fut rempli par la présidence qui, depuis lors, a profondément marqué le rythme de l'évolution de la construction européenne par le biais des changements périodiques dans la présidence du Conseil de ministres.10
Dans le cadre de cette évolution, la présidence s'est associée de différentes façons aux institutions: ainsi la Commission partage-t-elle en quelque sorte avec la présidence son rôle dans le domaine de l'initiative et du compromis. En ce qui concerne le Parlement européen, la présidence doit lui présenter son programme au début de son exercice et lui faire rapport à la fin de son mandat.
L'accroissement du rôle de la présidence est lié à la structure même des traités constitutifs, conférant au Conseil les pouvoirs de décision finale.11
La présidence a été façonnée par différents événements intervenus depuis la création des Communautés européennes jusqu'à nos jours.
Le premier événement fut la célèbre "crise de la chaise vide", en 1965/66, qui donna lieu au Compromis de Luxembourg et qui, par la suite, modifia l'équilibre établi dans les traités.12 Dans les années 60, la présidence était liée au développement des dispositions des traités fondateurs; plus tard, dans les années 70, la Commission commença à s'affaiblir à cause de la pratique du consensus au Conseil; le contexte international élargit le champ d'action des institutions européennes (notamment par l'usage de l'article 235 du Traité CEE), provoquant ainsi une multiplication des conseils (conseil Affaires générales et conseils techniques). Cette période fut marquée par de nombreux événements; en 1974, création du Conseil européen et premier élargissement,13 et dans le contexte de crise internationale, la présidence agit, notamment dans le domaine de la Coopération politique européenne, comme le bras exécutif.
En 1980, N. Ersböl fut nommé Secrétaire général du Conseil, poste qu'il occupera pendant 14 ans, développant les fonctions du Secrétariat général et contribuant ainsi à consolider l'autorité du Secrétariat général comme conseiller politique de la présidence.14
En 1986, l'Acte unique consacra le Conseil européen que certains observateurs considèrent comme l'institution ayant exercé la plus grande influence sur la Communauté et sur les politiques en Europe occidentale.15
En effet, du point de vue de l'opinion publique, les citoyens s'identifient beaucoup plus avec le Conseil européen composé des chefs d'Etat et de gouvernement qu'avec, par exemple, la Commission qui est considérée plutôt comme une bureaucratie supranationale. Sous l'angle de l'exercice de la présidence, le Conseil européen constitue souvent la dernière chance du pays qui l'assume pour se rattraper face à l'opinion publique.
Les fonctions développées par la présidence par le biais de l'action des ministres des Affaires étrangères, au sein du Conseil Affaires générales, exercèrent une grande influence sur le Conseil européen et transformèrent la forme et le sens des conclusions (il faut rappeler que les conclusions du Conseil européen n'ont pas de valeur juridique) rendues publiques à l'issue de ces réunions.16 Cela explique les propositions sur le rôle de la présidence faites dans les rapports successifs entre 1975 et 1983 (notamment le Rapport indemans en 1975 et le Rapport des Trois Sages en 1979). A partir de ces rapports, ce n'est que plus récemment, à l'issue du Traité de Maastricht, qu'on a recommencé à s'interroger sur le rôle de la présidence.
L'efficacité de la présidence
Il est toujours difficile d'évaluer une présidence; mais on sait toutefois que la présidence constitue une tâche difficile pour plusieurs raisons, notamment la brièveté de son mandat (six mois), la complexité du processus politique au sein de l'Union et l'importance accrue du Conseil européen.17
Dans toute présidence il y a du bon et du moins bon. D'après H. Wallace,18 les Etats membres diffèrent sensiblement dans leur façon de conduire la présidence et cela est dû fondamentalement à leurs différentes règles de droit et à leurs usages politiques et administratifs. Wallace affirme que les Etats membres exercent la présidence européenne suivant leur approche habituelle à l'égard des affaires européennes et que la présidence est le reflet de leurs intérêts. Le comportement national pendant la présidence constitue une extrapolation de la conduite normale des affaires au niveau interne. L'on peut néanmoins dégager quelques traits communs à toute présidence: a) la nature sui generis des affaires communautaires et le rôle central et coordinateur des ministères des Affaires étrangères;19 b) le rôle et les pouvoirs du gouvernement central, il s'agit d'obtenir le consensus interne en matière européenne; c) les changements des hiérarchies ministérielles: il s'agit souvent du rôle prédominant de certains ministères, comme le ministère des Affaires économiques; d) la gestion technique de dossiers, qui représente la plus grande part de l'activité de la présidence; e) le besoin de connaissances et capacités spécifiques en matière européenne,20 et, enfin f) le niveau d'implication dans les affaires européennes.
Il est possible de déterminer également un certain nombre de facteurs ayant une incidence particulière sur l'efficacité de la présidence:
* La durée de 6 mois: il s'agit d'une très courte période pendant laquelle il faut réagir à des événements parfois inattendus; l'efficacité dépendra d'éléments tels que la taille du pays, le degré de compromis, l'expérience et les relations avec les institutions européennes.
* L'expérience au niveau ministériel et des fonctionnaires; il est clair qu'il est nécessaire de bien connaître les procédures et le fond des dossiers.
* La taille du pays, dès lors qu'elle peut avoir des avantages et des inconvénients; ainsi, un petit pays devra supporter les lourdes tâches de la présidence, mais en même temps il sera en mesure de jouer un rôle de médiateur entre les grands pays.
* Le compromis sur les objectifs de l'intégration européenne; ce compromis est exprimé au niveau interne par le jeu politique.
* La collaboration avec la Commission européenne et le Parlement européen, compte tenu des interrelations des institutions dans les processus décisionnels complexes. Un bon travai en équipe avec la Commission s'est avéré essentiel.21
Bien évidemment, le contexte politique et économique général détermine également l'efficacité de la présidence. L'on reconnaît l'influence négative des processus électoraux dans les pays exerçant la présidence (on se souvient du cas des dernières présidences en Allemagne et en France, et le risque évoqué à plusieurs reprises d'élections générales anticipées en Espagne pendant la présidence en cours).
La présidence permet au pays qui l'exerce d'influencer la marche de l'Union dans la mesure de ses propres capacités d'innovation. Cela nous conduit à l'existence de différents styles de présidence que l'on peut définir comme suit:
Style d'engagement, l'orientation d'un pays envers l'intégration détermine l'engagement même de la présidence. Ainsi les Pays-Bas considèrent la présidence comme un service à l'Union; la Grèce définit sa présidence comme un rôle de gestion et d'émission de décisions pratiques; le Royaume-Uni met l'accent sur son image en tant que membre à part entière et tient à préserver sa réputation de bon gestionnaire; l'Allemagne insiste sur la responsabilité et l'Espagne sur la dignité de la présidence. Suivant leur style d'engagement, les Etats essaient d'influencer les institutions en utilisant divers outils (contacts bilatéraux, lettres aux chefs d'Etat, tournée des capitales...). Ce qui définit ce style, c'est la recherche de l'innovation, au-delà du rôle de gestion propre de la présidence.
Style d'agenda, la présidence doit déterminer l'ordre du jour des réunions et les modalités à suivre pour y introduire un point déterminé. La présidence peut avoir des objectifs clairs et aussi connaître la position de la Commission, mais la différence réside dans la façon de mettre ces objectifs à l'ordre du jour. La présidence a le choix du type de réunion (formelle ou informelle), de la définition d'un point concret comme objet de débat ou de décision, et aussi de la classification des points A et B.
Pour ce qui est du type de réunion, il est fréquent, au début de la présidence, d'organiser une réunion informelle des ministres pour donner l'occasion à la présidence d'expliquer ses intentions et d'explorer les possibilités d'accord au sein des conseils formels.
Style d'arbitrage. Il faut arrêter un texte qui puisse être accepté par tout le monde, sans qu'un accord soit cependant nécessaire; en d'autres termes, il s'agit d'offrir ses bons offices.
Le vote à la majorité fait que les Etats membres sont davantage prêts à accepter des compromis pour éviter le vote (la Grèce, l'Espagne et la France ont soutenu le vote à la majorité). Il faut noter que la présidence exclut parfois le vote formel lorsqu'elle sait qu'une décision aura le soutien nécessaire. Dans d'autres situations, un pays préfère perdre un vote pour montrer son impuissance à son opinion publique nationale.
La présidence cherche auss, dans la mesure du possible, à défendre ses propres intérêts, sans évidemment tomber dans le piège d'abuser de son pouvoir, ce qui lui ferait perdre la confiance des autres Etats membres. La présidence doit éviter le blocage, l'isolement d'un pays ou de groupes de pays. Encore une fois, il s'agit d'offrir ses bons offices. Un exemple clair en a été, pendant la présidence espagnole de 1989, l'ajournement de la Charte sociale pour pouvoir arrêter le compromis concernant les recommandations du Comité Delors sur l'UEM (la 1ère phase).
La présidence espagnole du Conseil de l'Union européenne
C'est la deuxième fois que l'Espagne assure la présidence du Conseil. La première présidence espagnole remonte au 1er semestre de 1989.22 Cette première expérience fut considérée positive, tant du point de vue de l'organisation des tâches conférées à la présidence23 que sous l'angle des objectifs atteints, parmi lesquels: la fixation de la date du 1er juillet 1990 pour le début de la première phase de l'Union Economique et Monétaire, et le travail de réalisation du Marché intérieur. Les faiblesses identifiées alors furent l'absence de l'impulsion nécessaire dans le domaine social, en particulier M. Solbes, alors Secrétaire d'Etat aux Communautés européennes (aujourd'hui ministre des Finances), reconnut ces faiblesses à l'égard de la Charte sociale et de la liberté d'établissement des étudiants et des retraités.
Rappelons que cette première présidence espagnole eut lieu dans un contexte général favorable à l'intégration en Europe et fut marquée dans le contexte européen par des événements politiques importants, comme les élections au Parlement européen en juin, dont le président sera l'Espagnol M. Baron Crespo, et l'installation de la nouvelle Commission qui comptait deux membres espagnols (MM. Marin et Matutes).
Nous nous trouvons actuellement en pleine présidence espagnole, cette fois-ci pendant le second semestre, caractérisé généralement dans la vie communautaire par l'approbation du budget. Cependant, bien d'autres événements d'une importance particulière vont marquer cette présidence.
Priorités de la présidence espagnole du Conseil de l'Union européenne, juillet-décembre 1995
Organisation de la présidence:
La responsabilité de la mise en oeuvre de la présidence est assumée, comme lors de la présidence précédente, par la Présidence du gouvernement qui compte essentiellement sur la collaboration du ministère des Affaires étrangères, et plus spécialement, sur celle du Secrétariat d'Etat aux Communautés européennes et de la Représentation permanente à Bruxelles, dont les membres assurent la présidence et la coordination de la plupart des réunions à Bruxelles.
En ce qui concerne le rôle des Communautés autonomes pendant la présidence, leur participation est assurée au niveau interne par les mécanismes existants de coordination (réunions sectorielles, conventions de collaboration, notamment) qui constituent les voies de formation de la position nationale présentée vis-à-vis de l'extérieur.
Compte tenu de la situation politique interne en Espagne, il y a eu des négociations entre le gouvernement national et les gouvernements des Communautés autonomes, en particulier celui de la Catalogne, pour assurer la collaboration et le soutien politique nécessaires.24
Il est important de signaler, du point de vue de l'organisation de la présidence, et par rapport à la première présidence espagnole, la création d'un Comité organisateur de la présidence,25 composé de 22 membres et présidé par le ministre des Affaires étrangères, et qui est épaulé par un organe exécutif. Les fonctions de ce comité sont la direction, l'impulsion et la coordination des actions de l'Administration générale de l'Etat pendant la présidence. L'existence de ce comité permet de centraliser la responsabilité de l'organisation des réunions de niveau supérieur au groupe de travail, en un seul organe administratif, ce qui assure une meilleure coordination et un meilleur contrôle des ressources.26 Pour l'évaluation finale, il faudra attendre le rapport définitif sur la gestion de la présidence, qui sera élaboré par ce comité.
Une autre information d'intérêt pratique sur le rôle de ce comité est l'édition d'une brochure de 31 pages, publiée par le Journal officiel espagnol, qui contient les priorités de la présidence, ainsi que la publication d'un guide pratique sur l'exercice de la présidence, qui a été distribué aux fonctionnaires. Ce guide contient des informations essentielles sur les comités et les groupes de travail, le COREPER et d'autres comités (113, comité politique et K4), les comités de la Commission, ainsi que d'autres questions d'intérêt pratique (usage des bureaux dans le nouveau bâtiment du Conseil, rapports avec la presse, etc.) et, enfin, le texte commenté du Règlement intérieur du Conseil.
Le programme de la présidence:
Le programme et les priorités de cette présidence furent présentés, selon l'usage établi depuis 1981, par M. Solana, ministre espagnol des Affaires étrangères, au Parlement européen (PE), le 12 juillet {1}995.27
Pendant son intervention au PE et avant de présenter les priorités de la présidence (ce qui souligne la dimension politique de la présidence), M. Solana expliqua la situation difficile en ex-Yougoslavie, pour ouvrir tout de suite après le débat au sein du PE, entre les groupes politiques et la Commission, et affirmer la volonté de la présidence espagnole de consacrer tous ses efforts à la recherche d'une solution à ce conflit.
Ensuite, M. Solan présenta le programme du semestre qui s'articule autour de quatre grands axes:
* la relance économique de l'Europe dans un cadre socialement intégré;
* une Europe ouverte aux citoyens;
* une Europe ouverte au monde dans la stabilité, la sécurité, la liberté et la solidarité;
* la fixation des bases pour l'Europe du futur: la Conférence intergouvernementale de 1996.
Pour ce qui est du premier point, les traits essentiels sont le développement économique et la création d'emploi, suivant le Livre blanc sur la croissance, la compétitivité et l'emploi; le passage vers la troisième phase de l'Union économique et monétaire,28 la consolidation d'un espace économique intégré et l'approfondissement de la dimension sociale de l'Union européenne.
En ce qui concerne le second grand axe, l'Europe ouverte aux citoyens, la présidence espagnole s'efforcera de promouvoir la légitimité, l'efficacité et la transparence et essaiera de donner une impulsion aux politiques qui affectent de plus près les citoyens (éducation, santé, consommateurs et culture). Un autre élément essentiel sous cet axe est la construction d'un espace de liberté et de sécurité dans l'Union, par le développement du troisième pilier de Maastricht, ce qui englobe, entre autres, la coordination des politiques d'asile et d'immigration, la coopération en matière de lutte contre le terrorisme, la reconnaissance des décisions judiciaires et la conclusion d'une nouvelle convention sur l'extradition.
En référence au troisième axe, l'Europe ouverte au monde dans la stabilité, la sécurité, la liberté et la solidarité, M. Solana souligna, dans le cadre de la Politique étrangère et de sécurité commune, la place prioritaire accordée à la résolution du conflit en ex-Yougoslavie, et demanda l'approbation du PE pour l'aide à la reconstruction de Mostar. En matière de sécurité et de défense, l'Espagne assume aussi la présidence de l'UEO. Il est à remarquer que c'est la première fois qu'un pays assume les deux présidences en même temps, ce qui permet de renforcer les liens entre ces deux organisations internationales. Au sein de l'UEO, la présidence espagnole va promouvoir l'élaboration d'un Livre blanc sur la sécurité en Europe et la contribution de l'UEO à la CIG de 1996.
En outre, toujours sous cet axe, on trouve les relations avec les pays d'Europe centrale et orientale, et avec Chypre et Malte dans la perspective de leur adhésion, ainsi que les relations avec la Russie et avec les pays de l'Espace économique européen et de la Méditerranée.29
La présidence espagnole doit confirmer, en particulier, la mise en vigueur le 1er janvier 1996 de l'Union douanière avec la Turquie.30
Dans ce domaine, citons encore la participation de l'UE au processus de paix au Proche-Orient et les négociations d'un accord de libre échange avec le MERCOSUR (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay) et de nouveaux accords avec le Chili, le Mexique et, pour la première fois, Cuba.
Signalons aussi la relance des relations avec les Etats-Unis par le biais de l'actualisation de la Déclaration transatlantique de {1}990, qui comprendrait une dimension politique, économique, de sécurité et de coopération.
L'Asie fait aussi partie des actiités envisagées par la présidence espagnole; ainsi il est prévu de signer des accords avec la Corée, le Cambodge et le Laos, et de soutenir le développement des relations avec le Japon et la Chine. Au début de la présidence, il y a eu la réunion avec l'ASEAN, l'UE étant représentée par la troïka; à ce sujet, l'Espagne devra préparer la rencontre Europe-Asie prévue à Bangkok en mars 1996.
Pour ce qui est enfin du dernier axe, c'est-à-dire le futur de l'UE, sur mandat du Conseil européen de Corfou, il fut décidé de créer un Groupe de réflexion chargé de préparer sous présidence espagnole la future Conférence intergouvernementale. Ce groupe, composé de quinze représentants personnels des ministres des Affaires étrangères, d'un représentant du Président de la Commission et de deux représentants du PE, s'est réuni pour la première fois à Messine le 2 juin dernier et a approuvé son agenda de travail, conformément au mandat renouvelé du Conseil européen de Cannes, qui mit l'accent sur les conséquences de l'élargissement de l'UE.
Le Groupe de réflexion travaille sur les questions suivantes: les défis, les principes et les objectifs de l'Union, les systèmes institutionnels, le citoyen et l'Union, la politique étrangère et de sécurité commune et les instruments au service de l'Union. Ces priorités font partie du programme de la présidence espagnole et se trouvent aussi dans les rapports sur le fonctionnement de l'Union élaborés par les institutions.31
Le rapport à élaborer par le Groupe sera soumis au Conseil européen de Madrid. La présidence espagnole exige également que ce Conseil convoque la CIG et en fixe la date pour le premier semestre de 1996 sous présidence italienne.
Les réactions des groupes politiques au sein du Parlement européen face à l'ambitieux programme de la présidence espagnole furent des réactions de soutien réclamant en même temps des résultats tangibles et concrets pour les citoyens. Quant aux députés espagnols, s'ils ont attiré l'attention sur le danger dû à la situation d'instabilité politique interne en Espagne, ils ont néanmoins confirmé leur plein soutien à la présidence.32
Réalisations de la présidence espagnole (du 1er juillet au 24 octobre 1995)
D'après le calendrier des sessions du Conseil33 de la présidence espagnole, 2 sommets ont été prévus en dehors du Conseil européen des 15/16 décembre à Madrid. Il s'agit du Conseil européen informel à Majorque (22/23.9.95) et de la Conférence euro-méditerranéenne à Barcelone (27/28.11.95). Le calendrier arrêté prévoit 51 réunions du Conseil.
En ce qui concerne les réalisations à mettre à l'actif de la présidence jusqu'ici et en fonction des différents domaines couverts, il convient de mentionner ce qui suit:
* En matière économique, dès le premier ECOFIN tenu à Bruxelles le {1}0.7.95, les ministres signalaient la priorité donnée à la création d'emploi, priorité de la présidence, et l'importance de l'élaboration de rapports nationaux sur des programmes pluriannuels que les Etats membres devront présenter en octobre, en vue d')lorer un rapport de synthèse qui sera présenté au Conseil européen de Madrid.
Il faut souligner que la position de la Commission sur la réduction du taux de chômage se veut plus optimiste que celle des ministres, ce qui a suscité certains commentaires de la part de la présidence qui se demande si l'ambitieux objectif de la Commission peut être réellement atteint.34 Le rôle de médiateur de la présidence s'est affirmé dans le second ECOFIN du 18.9.95, dans lequel, grâce au compromis de la présidence, la directive sur les transferts bancaires transfrontaliers a pu être approuvée.35 Ensuite, le dernier ECOFIN informel du 2.10.95, à Valence, a connu un certain succès dans la mesure où les ministres se sont mis d'accord pour maintenir les critères de convergence du Traité sur l'Union européenne (ci-après TUE) et fixer la date du 1er janvier {1}999 pour la 3ème phase de l'UEM. Le Président de la Commission a affirmé que les projets pour l'UEM sont en marche et que la réunion a servi à éclairer et à dissiper les incertitudes.36 L'ECOFIN formel qui aura lieu le 27 novembre devra prendre les décisions restées en suspens, notamment le rapport à présenter au Conseil européen sur le passage à la 3ème phase de l'UEM.
* En matière de sécurité et de défense, il convient de mentionner aussi le Conseil informel des ministres des Affaires étrangères à Santander, le 9.9.95,37 au cours duquel les discussions ont porté sur l'identité européenne de défense, sur la base d'un document élaboré par la présidence espagnole. Certes, les différences entre les Etats membres sont grandes, mais le point commun est le besoin d'un rapprochement graduel entre l'UEO et l'Union, certains Etats membres, comme le Royaume-Uni, considérant impossible la totale intégration entre ces deux entités. En ce qui concerne les travaux du Groupe de réflexion dans ce domaine, les membres sont d'accord sur la nécessité d'établir un centre d'évaluation et d'analyse, et de nommer un responsable pour le diriger, ainsi que d'assurer la représentation de la Commission.38
* En matière de justice et affaires intérieures, le Conseil des ministres du 25.9.9542 a débattu de différents sujets tels que le racisme et la xénophobie, la convention sur les procédures d'insolvabilité, etc. La présidence va élaborer un document sur le rapprochement des pratiques judiciaires et administratives et l'amélioration de la coopération en la matière. A l'initiative de la présidence, le Conseil du 13.10.95 a discuté de la collaboration en matière de lutte contre le terrorisme, et la présidence souhaite que cette discussion débouche sur une déclaration officielle.43 Par ailleurs, signalons l'initiative de la présidence sur l'adoption d'une action commune en matière de lutte contre le racisme et la xénophobie, qui s'avère difficile étant donné son caractère plus contraignant. En ce qui concerne l'extradition, la présidence veut discuter la question de l'octroi de l'asile aux personnes qui ont commis des "délits politiques" et définir avec précision cette notion. Les possibilités d'action dans ce domaine semblent être assez difficiles en raison de leur nature même.
* En matière d'éducation, les Quinze sont aussi d'accord pour adopter des mesures en vue de lutter contre le racisme et la xénophobie à partir des programmes éducatifs (réforme des programmes, formation des professeurs, création d'associations entre les centres d'enseignement et les élèves, etc.). Une autre initiative de la présidence dans le domaine de l'éducation tend à provoquer un débat sur la possible implantation en Europe du système espagnol de participation sociale dans les écoles.44
* Dans le domaine culturel, la présidence a réussi à débloquer la situation en ce qui concerne la directive sur la télévision sans frontières et la question des quotas (obligation de diffuser 50% de productions européennes). Les ministres ont exprimé leur volonté d'arriver à un compromis lors de la réunion à Madrid, le 20.10.95. Face aux positions opposées de certains pays (la France face à Allemagne et au Royaume-Uni, notamment), la présidence a joué un rôle de conciliateur, bien qu'étant ouvertement en faveur de la réforme de ladite directive. D'autres actions portent sur l'accord de principe sur le programme Raphaël (conservation et restauration du patrimoine) et l'approbation du programme Kaleidoscope 2000 (échanges artistiques). Il y a consensus pour que la capitale européenne de la culture de l'an 2000 soit partagée entre plusieurs villes européennes.45
* En matière sociale, la présidence espagnole, lors du Conseil des ministres du 5.10.95, a réussi à faire approuver par les Quinze certaines propositions, en particulier la résolution contre le racisme et la xénophobie et l'intolérance raciale, qui est une priorité de la présidence, ainsi que la résolution sur l'utilisation de l'image de la femme dans les médias. Par contre, les propositions espagnoles sur la lutte contre l'exclusion et l'égalité des chances ne furent pas adoptées en raison de certaines réticences.46
* Dans le secteur de l'environnement, le Conseil du 6.10.95 a approuvé, sous l'impulsion de la présidence, une décision sur les échanges d'information en matière de pollution de l'air; en outre, au cours du Conseil des 21/22.10.95, la présidence a réussi à faire partager aux Quinze, outre les préoccupations quant à la qualité de l'eau, également celles sur la quantité, notamment la sécheresse dont souffrent l'Espagne et le Portugal. L'idée avancée par la Commission est d'élaborer une directive-cadre visant à clarifier les normes sur l'eau qui sont actuellement dispersées dans 17 directives différentes. Lors de la réunion, les ministres ont insisté sur le fait qu'une réunion informelle produit uniquement des débats et des conclusions, mais aucun accord. Il faut aussi mentionner le compromis atteint pour soutenir la candidature de l'Espagne comme siège de la Convention sur la biodiversité.48
* En ce qui concerne la participation des régions, sgnalons la réunion du Comité des régions à Barcelone le 3.10.95 à laquelle participait le ministre espagnol des Administrations publiques au nom de la présidence de l'UE. M. Pujol, parlant au nom du Comité des régions, exprima le regret qu'il y ait eu des malentendus de la part du Groupe de réflexion à l'égard des prétentions du Comité, en particulier la légitimation en matière de subsidiarité devant la Cour de justice des CE. En vue d'une discussion plus approfondie, le Président du groupe, M. Westendorp, participera à la réunion du Comité des régions du 16 novembre prochain.47
* Le Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement à Majorque le {1}2/23-9.95.39 Le Président du groupe de réflexion a produit un rapport intermédiaire sur la Conférence intergouvernementale de {1}996,40 qui a été présenté à l'occasion de ce Sommet. Ce Sommet a été en quelque sorte "une réunion de famille", restreinte aux Quinze chefs d'Etat, au Président de la Commission et à un représentant de la présidence espagnole qui était chargé de prendre les notes. L'idée était de débattre de l'architecture européenne, suite à l'opinion de la Russie d'inclure l'Europe centrale et orientale dans la structure économique et militaire de l'Occident. Le Sommet a abordé divers sujets et a révélé des différences entre les Quinze, mais aussi des convergences. Concernant la réforme future des traités, le Président de la Commission, Jacques Santer, a mis en garde contre une approche minimaliste de la réforme des traités. Il a été confirmé que la CIG de 1996 aura lieu sous présidence italienne et qu'il faudra que tous les EM ratifient la réforme avant d'entamer les prochains élargissements.41 D'autres sujets sur lesquels les Quinze se sont mis d'accord ont été l'aide à la reconstruction de la Bosnie, à laquelle les EM sont disposés à contribuer à hauteur d'un tiers de la somme totale. En ce qui concerne la préparation de la Conférence euro-méditerranéenne, les Quinze envisagent la participation des 12 pays de la région, sans aucun observateur externe, la Mauritanie étant cependant invitée. La présidence espagnole travaille sur un texte des conclusions de la Conférence qu'elle a soumis aux pays riverains pour commentaires. Ajoutons au sujet de cette conférence, les discussions entre la France et l'Espagne, à l'occasion du 9ème Sommet franco-espagnol du 10.10.95, sur les participants à cette conférence. Il semble finalement qu'il n'y aura pas d'observateur (rappelons que la présidence espagnole veut inviter la Russie, les USA et l'Europe centrale et orientale).
En outre, lors de ce sommet entre les deux pays, et face aux réactions qu'ont déclenchées les essais nucléaires français, M. González a défini la présidence comme un exercice de solidarité envers les Etats membres. Après le sommet de Majorque, le Président González, montrant l'à-propos d'un rapprochement avec le Parlement européen (PE), a informé son Président, M. Haensch, des résultats et a annoncé la possibilité de compter sur la participation du PE pour la prochaine réunion informelle. En outre, pour faciliter les échanges avec le PE, M. González a été invité à participer au "Débat sur l'état de l'Union" qui aura lieu au PE du 13 au 17 novembre prochains.
* Pour ce qui est du volet des relations extérieures, la présidence a réalisé de nombreuses activités, dont:
La signature d'un accord intérimaire avec la Russie,49 dans l'attnte de l'entrée en vigueur de l'Accord de coopération et d'association signé à Corfou en juin 1995 (il faut rappeler que l'UE est le premier partenaire commercial de la Russie). En outre, les Quinze soutiennent l'entrée de la Russie au Conseil de l'Europe.
La signature d'accords avec le Vietnam, Israël et sur l'autonomie de la Cisjordanie.
Les travaux concernant les rapports UE-USA.50 La présidence espagnole et la Commission présenteront un plan d'action en vue de la réunion à Madrid, avec les représentants des Etats-Unis, le 3 décembre prochain. Ce plan abandonne l'approche au cas par cas, pour une globalisation des relations transatlantiques, à partir de la Déclaration de 1990, à laquelle sera ajouté un document annexé. Le plan envisage plusieurs domaines de coopération (commerce, culture, audiovisuel...) qui exigeront des années de préparation (en particulier, l'établissement d'une zone de libre échange entre l'UE, les USA et le Canada).
L'activité de la présidence à l'égard de l'Amérique latine mérite une attention particulière. Ainsi, les négociations entre l'UE et les 4 pays du MERCOSUR sont à présent terminées, et sera signé à Madrid (probablement à la fin du mois de novembre) l'Accord entre l'UE et le MERCOSUR (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay), de coopération globale en matière commerciale et économique entre les deux régions. Reste à déterminer, du point de vue juridique, si cet accord tombe sous la seule compétence de l'Union ou bien sous celle de l'UE et de ses EM (dans ce cas, il devra être ratifié par tous les EM).51
Les Quinze ont aussi donné leur accord à l'ouverture de pourparlers avec Cuba qui seront menés par la troïka; le Conseil tiendra un débat par la suite sur les possibilités d'ouvrir des négociations aboutissant à un accord en matière économique et commerciale.52 La présidence veut entamer des négociations avec le Mexique en vue de la création d'une zone de libre échange, mais il faut encore attendre le mandat de négociation. La possibilité d'un accord avec le Chili attend aussi le mandat de négociation requis. Enfin, les rapports avec l'Amérique centrale seront régis par un nouvel accord de coopération qui sera présenté sous présidence italienne.
En outre, la présidence s'efforce aussi d'obtenir l'augmentation du total des crédits de la Banque européenne d'investissement destinés à l'Amérique latine. Il s'agirait d'une somme de 540.000 millions de pesetas (environ ECU 3.418 millions) pour 4 ans.
L'intérêt de la présidence espagnole dans le rapprochement des deux régions a été de nouveau mis en relief lors du Ve Sommet ibéroaméricain (les 19 pays d'Amérique latine, le Portugal et l'Espagne), qui s'est tenu à Bariloche (Argentine), le 15 octobre dernier. Les réunions ont abordé divers sujets et, en particulier, ont facilité la poursuite des négociations pour le rapprochement des positions entre les deux régions, en vue de la conclusion des accords susmentionnés.
Signalons aussi la représentation de l'UE à la cérémonie du 50e anniversaire des Nations unies (ONU), où le Président González a réaffirmé dans son discours le rôle prédominant de l'UE en tant que premier contributeur au budget de l'ONU et en ce qui concerne le nombre des ressources hmaines envoyées en mission de paix, et a rappelé que l'UE est le principal bailleur de fonds en matière d'aide humanitaire et de coopération au développement.53 A cette occasion, l'on a pu distinguer deux grands aspects de la présidence; d'un côté, la représentation de l'UE (le discours politique mentionné, la conférence de presse et les contacts bilatéraux) et, de l'autre côté, les retombées au niveau national, c'est-à-dire, l'impossibilité pour M. González en tant que Président du Conseil mais également Président de son pays, de parler expressément de la situation de Gibraltar (M. González a fait seulement allusion aux progrès en matière de décolonisation). Il convient de souligner que l'image donnée par M. González en sa qualité de Président de l'UE est très positive, alors que dans son pays, il s'agit d'un homme harcelé politiquement.
Perspectives futures pour la présidence du Conseil de l'Union européenne
D'année en année, l'importance de la présidence du Conseil semble s'accroître inexorablement comme conséquence du caractère unique du système politique de l'Union. Il est fort probable que la présidence continuera de jouer un rôle essentiel, dans la mesure où le Conseil continue à exercer des fonctions législatives ainsi que des fonctions exécutives.
Dans cette perspective, la CIG de 1996 ne va pas modifier le système de partage du pouvoir entre les institutions, mais les Etats membres continueront à occuper une place centrale, vu les élargissements envisagés et le besoin ressenti en Europe de développer une capacité de défense européenne. Tout cela exige donc un Conseil investi d'autorité.
On pourrait s'interroger sur le futur rôle de la présidence et à cette fin avancer certaines idées utiles axées autour de 5 principaux aspects.54
* Le rôle de la présidence, il est fondamental de bien comprendre ce rôle et de souligner la fonction de bureau au service de l'Union que doit assurer toute présidence. Il serait donc indiqué d'ajouter plusieurs articles aux traités qui seraient consacrés aux fonctions de la présidence et à ses responsabilités.
* La responsabilité de la présidence devant, notamment, le PE; la possibilité pour ce dernier d'exercer un contrôle, ce qui renforcerait la légitimité démocratique de l'UE.
* La transparence accrue vis-à-vis de l'opinion publique. Il est souhaitable d'élargir les responsabilités de la présidence dans le domaine de l'information et, en particulier, les rapports avec les médias.
* La continuité ou discontinuité liée au concept de la rotation des présidences. Les idées déjà entendues font référence à un système plus stable de permanence de 3 ou 4 ans, ce qui n'irait pas sans poser de nombreux problèmes pratiques. Un sytème de présidence de groupes de pays (4 ou 5 groupes représentant 100 millions de citoyens) pour une durée d'un an ou de 18 mois (il y a eu des précédents sous présidence luxembourgeoise à cause du manque de fonctionnaires pouvant assurer toutes les réunions).
Le Groupe de réflexion souligne l'importance du rôle de la présidence et les aspects positifs du système de rotation (sentiment d'appartenance et esprit d'émulation, en effet, la non-confiscation permanente du pouvoir par un seul Etat). Mais, face aux difficultés d'une Union élargie et du ralentissement qui en résulterait dans la rotation, il convient d'assurer une certaine permanence ainsi que la visibilité de la présidence.
L'idée avancée par le Groupe est d'envisager un système qui puisse combiner les deux principes de la rotation et de la permanence. D'où l'idée évoquée ci-dessus d'une présidence collective. Ou encore la possibilité d'élire un président ou haut représentant de l'UE (en particulier pour les affaires de politique extérieure). Il serait aussi possible d'envisager des changements dans le système de la troïka, par exemple elle serait composée d'un grand pays et de deux petits pays.
* Et, enfin, l'extension des fonctions exécutives de l'Union en vue de la réforme des traités qui aura lieu en toute probabilité lors de la CIG de 1996, extension qui, par définition, doit impliquer de nouvelles fonctions pour la présidence. C'est ainsi que le Rapport intermédiaire du Président du Groupe de réflexion, mentionné ci-avant, comporte certaines remarques relatives à la présidence et reconnaît la nécessité de renforcer le rôle du Conseil par l'intermédiaire de ses capacités d'action.
Il ne faut pas oublier que l'UE tire une grande partie de sa légitimité de sa capacité à résoudre les problèmes qui lui sont posés.
La légitimation et la capacité d'action sont deux aspects essentiels, compte tenu des élargissements à venir. A cette fin, on pourrait envisager de redonner un rôle d'impulsion au Conseil européen et de le doter de pouvoirs renforcés.55
Pour conclure, l'on pourrait s'interroger sur le bilan de la présidence espagnole et son rôle à l'égard des perspectives futures. Bien entendu, la présidence n'est pas encore terminée; dès lors, outre les réalisations déjà mentionnées, de nombreux événements peuvent encore se produire et il faudra surtout examiner les résultats à la lumière du Conseil européen de Madrid. Cependant l'on pourrait faire une première évaluation positive de cette deuxième présidence espagnole. Tout d'abord, du point de vue de l'organisation et des résultats, si l'on revient au programme de la présidence, l'on constate une certaine cohérence avec ce qui a déjà été fait. Il faut rappeler que le succès ou l'échec d'une présidence est dû en grande partie à la façon dont elle exerce ses fonctions, mais que ses actions dépendent de la volonté des Etats membres. Quant à l'avenir, la présience a montré l'engagement de l'Espagne envers l'intégration européenne, et les travaux du Groupe de réflexion en sont la preuve. En outre, il faut citer à nouveau le document élaboré par le gouvernement espagnol et présenté devant son Parlement, en mars 1995, sur la Conférence de 1996. On y retrouve les idées avancées ci-dessus sur le rôle futur de la présidence; on y suggère l'institutionnalisation de la présidence (définition de ses responsabilités), l'accroissement de sa légitimité par le biais du contrôle du PE, l'amélioration de la transparence (faire des rapports sur sa gestion) et, le plus important, la garantie de sa continuité. Pour cela, plusieurs formules sont possibles:
* Prolonger la période de la présidence (2 ans), ce qui présente les inconvénients de freiner la rotation, d'empêcher l'enrichissement régulier de l'UE par les sensibilités nationales et, finalement, l'absence de garantie d'une présence équilibrée des EM.
* Créer des groupes de présidences (idée évoquée ci-dessus), avec l'inconvénient de la difficulté de coordination entre les groupes.
* Instaurer une présidence de style troïka (1 grand pays et 2 moyens/petits pays). Il s'agirait d'une formule provisoire56 en vue de l'implantation d'un système de troïka de rotation tous les 6 mois. Les avantages de ce système seraient le renforcement de la présidence (les propositions feraient l'objet d'un consensus entre {1} pays), l'exercice de la présidence à un intervalle de 5 ans (s'il y avait 30 pays membres et les présidences étaient de 6 mois) et le maintien de l'équilibre entre les Etats.
* Instaurer une présidence collective, élue par les Etats membres pour 1 an (la question est de savoir qui devrait l'élire: le Conseil européen, le PE ou les deux?).
* Enfin, l'on cite l'importance d'une présidence qui assure la représentation extérieure pendant 2 ans et demi, occupée par une personnalité qui ne proviendrait pas nécessairement du Conseil européen, mais qui serait choisie par celui-ci et par le PE; avec {1} vice-présidences (occupées par le président du Conseil suivant la rotation ou un autre système, et le président de la Commission). Ce système est mentionné dans le rapport du Groupe de réflexion en des termes légèrement différents. Au sein du groupe il n'y a pas d'accord sur ce point, même s'il est dit que certains pays considèrent le Président de la Commission comme la personnalité (nommée par le Conseil européen et investie par le PE), qui jouit de toute la confiance nécessaire. p
NOTES
1. Il susbiste encore quelques dispositions qui sont devenues obsolètes (art. 243 sur la convocation de l'Assemblée) ou bien d'une application très restreinte (art. 5 et 6 sur la démission des juges de la CJCE).
2. Décision du Conseil du 6 décembre 1993, JO L 304/1 du {1}0/12/93, dont la première rédaction date du 24 juillet 1979.
3. La succession des présidences de 1995 à 2003 (d'abord le pays assumant la présidence pendant le premier semestre et ensuite celui assurant la présidence du deuxième semestre) se présente comme suit: 1995 (France, Espagne); 1996 (Italie, Irlande); 1997 (Pays-Bas, Luxembourg); 1998 (Royaume-Uni, Autriche); 1999 (Allemagne, Finlande); 2000 (Portugal, France); 2001 (Suède, Belgique); 2002 (Espagne, Danemark), 2003 (Grèce).
4. Voir: Di Bucci, "La Présidence des Communautés", Centre Européen de Nancy, 1988.
5. Voir: A. Mangas, "La presidencia del Consejo de las Comunidades", Gaceta Jurídica, 1988.
6. Ainsi, la présidence a la compétence de représenter l'Union et la responsabilité de la mise en oeuvre des actions communes, y inclus le financement d'une action commune arrêtée par le Conseil (art. J.5).
7. La présidence doit informer le PE régulierèment des travaux dans ce domaine (art. K.6).
8. Voir: J. Verbake and W. Van de Voorde, "The Presidency of the EU: some reflections on current practice and recent evolutions", Studia Diplomatica, vol.XLVII, 1994, nº 3.
9. Voir: J. L. Dewost, "La Présidence dans le cadre institutionnel des Communautés européennes", dans "The impact of European affairs on National Administrations, the case of the Presidency"; J. M. Hoscheit, EIPA, 1983.
10. Voir: R. Pourvoyeur, "The Presidency of the Council in the EC".
11. Voir: P. Pescatore, "L'exécutif communautaire: justification du quadripartisme institué par les Traités de Paris et de Rome", CDE nº 4, 1978.
Voir: P. Ludlow "The Presidency of the Council: a new power in the European integration", CEPS, winter quarter 1994/95.
12. Voir: H. Wallace, "Role and evolution of the Presidency", dans "The impact of European affairs on National Administrations; the case of the Presidency", J. M. Hoscheit, EIPA, 1983.
13. Il faut noter que pendant les négociations, 1961/63, la présidence dura seulement 3 mois.
14. Voir: E. J. Kirscher, "Decision-making in the European Community; the Council Presidency and European integration", 1992.
15. Voir: H. Wallace, "Role and evolution of the Presidency", dans "The impact of European affairs on National Administrations; the case of the Presidency", J. M. Hoscheit, IEAP, 1983.
16. En particulier, il faut rappeler la crise, sous présidence du Royaume-Uni, en 1981, concernant le problème du budget britannique, Esrböl eut l'idée de faire rédiger les conclusions par la présidence, le Secrétariat général et la Commission.
17. Voir: P. Ludlow "The UK Presidency: a view from Brussels", JCMS, vol. 31, nº 2, June 1993.
18. Voir: H. Wallace, "The Presidency of the Council of Ministers of the European Communities: A comparative perspective", dans "The Presidency of the European Council of Ministers", C. O Nuallain, 1985, IEAP.
19. Wallace parle d'une dialectique spécifique, en matière européenne, entre les diplomates, les fonctionnaires et leurs supérieurs dans les ministères.
20. Il est d'usage d'organiser des séminaires de préparation à la présidence destinés essentiellement aux fonctionnaires nationaux qui seront chefs de délégation ou présidents des groupes de travail.
Dans ce but, et comme ce fut le cas pour la présidence espagnole en 1989, le Comité organisateur de la présidence pour 1995, demanda à l'Institut européen d'administration publique de Maastricht (Pays-Bas), d'organiser un séminaire de préparation à la présidence, qui eut lieu à Segovia (Espagne), du 25 au 28.4.95.
21. Voir G. de Bassompierre "Changing the guard in Brussels: an inside view of the EC Presidency", Center for Strategic and International Studies, 1988.
22. Voir: E.G. Sánchez, " La presidencia española de la Comunidad europea", Revista de instituciones europeas, 1989. Et aussi, E.J. Kirchner, "Decision making in the European Community. The Council Presidency and European integration", Manchester University, 1992.
23. Rappeler les fonctions qui, d'après différents auteurs, sont conférées à la présidence: la fonction administrative, la fonction d'initiative, la fonction de coordination verticale et horizontale, et la fonction de représentation.
24. Les principaux sujets d'intérêt des Communautés autonomes pendant cette présidence européenne comportent, entre autres, l'éventuelle réforme du Comité des régions, liée avec le jeu du princip de subsidiarité, et la Conférence euro-méditerranéenne à tenir à Barcelone les 27 et 28.11.95.
25. Décret royal 1102/1994 du 27 mai, Journal Officiel nº 137 du 9.6.94.
26. Pour ce qui est du budget alloué à cette présidence dans les Budgets Généraux de l'Etat, on peut indiquer la somme de 3.400 millions de pesetas (environ 21,5 millions d'ecus), destinés à couvrir un total de 20 réunions, du niveau supérieur au groupe de travail à tenir en Espagne.
27. Voir PE 193/145/ES et Agence Europe du 13.7.95
28. En concertation avec la Commission et l'Institut monétaire européen, la présidence présentera un rapport au Conseil européen de Madrid, sur le modèle de référence pour l'introduction de la monnaie unique.
29. Aura lieu à Barcelone, les 27 et 28 novembre 1995, la Conférence euro-méditerranéenne, avec la présence des Quinze et de {1}2 Etats riverains, la question d'inviter des observateurs et de la participation de la Libye s'avère cependant difficile.
30. Question sur laquelle le PE a le mot de la fin et qui semble soulever des réticences vis-à-vis du respect des droits de l'Homme dans ce pays et, en particulier, sa législation contre le terrorisme.
31. Voir le Rapport de la Commission sur le fonctionnement du Traité sur l'Union européenne, du 10 mai 1995, et aussi le document élaboré par le Gouvernement espagnol "La Conferencia Intergubernamental de 1996: Bases para una reflexión", présenté dans le Comité conjoint pour les Affaires européennes du Parlement espagnol, en mars 1995 (voir Agence Europe des 4 et 11 mars 1995).
32. Voir: EL PAIS, du 12.7.95.
33. Agence Europe du 7/7/1995.
34. EL PAIS du 24.10.95.
35. EL PAIS, 19/9/95.
36. L'idée est d'introduire des mécanismes flexibles par le biais de l'établissement d'une période intermédiaire (phase 3A) d'une durée de 3 ans et demi, les banques pourront choisir le moment d'opérer avec l'ECU entre 1999 et 2002. Agence Europe du {1}/3.10.95.
37. Agence Europe du 9 et du 11/12.9.95.
38. Agence Europe du 6.10.95.
39. Agence Europe du 20 et 21.9.95 sur la préparation et la lettre envoyée par le président en exercice, M. González; et Agence Europe du 25/26.9.95, et EL PAIS du 22, 23 et 24.9.95.
40. Agence Europe du 4/5, 6, 7 et 27.9.95, avec le texte en supplément.
41. Sur le plan économique, après les remous provoqués par les déclarations du Ministre allemand, M. Waigel, sur l'exclusion de l'Italie du groupe de tête pour l'UEM, M. Kohl dut renouveler sa confiance à l'Italie.
42. Agence Europe du 23.9.95.
43. Agence Europe du 16/17.10.95, EL PAIS du 24.10.95.
44. EL PAIS du 24.10.95.
45. EL PAIS des 19, 20 et 21-10.95 et Agence Europe du 18.10.95.
46. Agence Europe des 4 et 5.10.95 sur le Conseil social à Luxembourg du 5.10.95.
47. Agence Europe du 4.10.95.
48. Agence Europe du 5.10.95 et EL PAIS des 21, 22, 23 et {1}4.10.95.
49. EL PAIS du 17/7/95.
50. Agence Europe du 30.9.95.
51. Agence Europe du 30.9.95 et des 2/3.10.95.
52. Agence Europe des 2/3. 10.95, Conseil Affaires générales à Luxembourg du 2.10.95.
53. El PAIS des 23 et 24.10.95.
54. Voir: P. Ludlow, "The Presidency of the Council; a new power in the European Union, in "L'équilibre européen". Etudes rassemblées et publiées en ommage à N. Ersböll. Ed. provisoire.
Voir: le Rapport intermédiaire du Président du Groupe de réflexion, Madrid, du 3 août 1995.
55. Voir: Assemblée Nationale, Rapport d'information n° 1939 sur les réformes institutionnelles de l'UE, du 8.2.95.
56. Voir: W. Weidenfeld (dir.), Europe '96 Pour une réforme de l'Union européenne, Edit. Fondation Bertelsmann, 1994.